Amendement sur les superdividendes adopté
Les ministres au banc doivent regretter les séances publiques de la XVe législature. Si ces dernières n’étaient pas moins longues, la composition de l’Assemblée nationale leur permettaient de faire la pluie et le beau temps dans l’hémicycle. Après le camouflet d’hier sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, les députés examinaient les amendements au projet de loi de finances 2023.
Si la séance de l’après-midi s’est déroulée de façon assez sereine, sans incident notable ni adoption surprise, cela n’a pas été le cas de la séance du soir.
En cause ? L’amendement 3486 du député Jean-Paul Mattei, président du groupe MoDem. Que dit l’amendement ? En substance, il propose de taxer — non pas les superprofits — mais les superdividendes ou les super-plus-values. Objectif affiché : inciter les entreprises à utiliser les profits exceptionnels qu’elles ont pu dégager, dans des investissements.
Le rapporteur général du budget – Jean-René Cazeneuve — et le Gouvernement ont donné un avis défavorable. C’était sans compter sur l’avis des députés. Le scrutin s’annonçant très serré, la présidente de séance Valérie Rabault a procédé à un scrutin public.
Résultat : 227 pour et 88 contre. L’amendement a donc été adopté. Mais, le plus intéressant reste le détail du scrutin :19 députés Renaissance ont voté pour l’amendement, dont Sacha Houlié, qui s’était déjà prononcé en faveur d’une taxe sur les superprofits. Le groupe RN a intégralement voté pour l’amendement, de même que le groupe LFI, le groupe MoDem, le groupe socialiste, le groupe écologiste et le groupe GDR. Plus timides sur ce sujet, seuls quatre députés LR ont voté pour. Le groupe Horizons s’est abstenu, à l’exception de Thierry Benoît qui a voté pour. Quant au groupe LIOT, ils ont majoritairement voté pour, sauf Charles de Courson.
Bien entendu, il serait prématuré d’imaginer que la mesure va entrer en application demain. Le projet de loi de finances pour 2023 n’en est qu’à sa première étape d’examen. Le Sénat — majoritairement à droite — peut défaire la mesure. Le Gouvernement peut demander une seconde délibération. Rien n’est joué à ce stade. On peut se demander si les députés — qu’ils soient dans l’opposition ou dans la majorité présidentielle — n’ont pas été échaudés, voire agacés par les rumeurs d’utilisation de l’article 49 alinéa 3 sur le projet de loi de finances pour 2023 ou les menaces de dissolution de l’Assemblée nationale.
Si certains députés, comme Sébastien Delogu dans un space sur Twitter, disent ouvertement qu’ils n’ont pas peur de retourner faire campagne, le fait est qu’une dissolution serait problématique. Au-delà de la question du calendrier parlementaire, se posera la question de savoir comment les partis et surtout les candidats pourront faire une campagne. Ces derniers n’ont pas encore été remboursés des sommes qu’ils ont engagés pour leur élection. Par ailleurs, le contexte social actuel risque de ne pas porter bonheur à l’exécutif en cas de dissolution.
Ainsi que le disait en aparté un député LR, avec un air particulièrement gourmand, sans être faiseur de roi, les députés ont retrouvé un réel pouvoir de décision à l’Assemblée nationale.