42 secondes, c’est le temps d’examen moyen que les députés devraient observer s’ils veulent voter la première partie du budget. Explications.
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Budget 2026 : 42 secondes, douche comprise

On savait que les débats allaient être longs. Mais, l’impression générale qui découle de cette journée pleine d’examen du budget 2026 est que les députés ne veulent pas que les débats aillent à leur terme.

Un homme, ça se contient, mais pas un député

En raison des délais d’examen contraint, il avait été demandé aux députés de tempérer leurs ardeurs sur le dépôt d’amendements.

Seuls deux groupes ont respecté cette consigne : le groupe socialiste et le groupe Rassemblement national. Tous les autres groupes, sauf les non-inscrits qui ne sont pas un groupe, ont décidé de faire comme s’il n’y avait pas de problème de temps et de déposer quasiment autant d’amendements qu’ils le souhaitaient. L’idée était que les groupes déposent autant d’amendements qu’ils ont de membres.

Le groupe de la Droite Républicaine est responsable de 21 % des amendements déposés (272), le groupe EPR de 15 % (199) et LFI, de 15 % (197).

Un problème constitutionnel de délai

Pourquoi vouloir contraindre la discussion autour du budget ? L’article 47 de la Constitution de 1958 impose un délai maximal de 70 jours pour discuter du projet de loi de finances. Or, on a tardé à avoir un gouvernement et le texte n’a pas pu être déposé dans les délais habituels, à savoir début octobre.

À titre de comparaison, lors du projet de loi de finances pour 2018, qui avait été très dense, la première partie du budget avait déjà été bouclée, au prix d’un prolongé très nocturne.

Si les délais ne sont pas tenus, le gouvernement peut envoyer le texte initial au Sénat ou au pire, légiférer par ordonnances.

Mais, dans ces deux hypothèses, les amendements adoptés ne seraient pas forcément retenus, d’autant que le Sénat est à droite et que les amendements adoptés sont au moins en partie issus des rangs de la gauche.

Des députés trop bavards

Approximativement 300 amendements ont été adoptés depuis vendredi après-midi. C’est très peu, d’autant qu’on a siégé toute la journée de samedi et de lundi, ce qui est rare. En effet, il arrive de siéger le lundi, mais de 15 h à 20 h. C’est assez inédit de convoquer les députés dès 9 h du matin un lundi.

En faisant un calcul rapide du temps restant en séance — en partant du principe qu’on ne siège pas ce week-end — on obtient un chiffre effrayant : pour examiner tous les amendements, il faudrait que l’examen de chaque amendement se fasse en 42 secondes.

Cela ne prend pas en compte les explications de vote à la fin du texte, ni les rappels au règlement ni les demandes de suspension de séance, ni les inscrits aux articles.

Même en adoptant une présidence de séance comme Marc Le Fur, aimablement surnommé « président TGV » en raison de sa rapidité, il est impossible d’arriver au bout.

En ajoutant le dimanche de séance, on arrive 55 secondes par amendement.

Pousser le gouvernement à la faute ?

À quoi jouent les députés ? On peut se le demander. Souhaitent-ils pousser le gouvernement à la faute et le forcer à dégainer l’article 49 alinéa 3 ?

Dans cette hypothèse, la suite serait connue : les députés déposent une motion de censure, elle est probablement adoptée, le gouvernement tombe et poussé au pied du mur, le président de la République annonce une dissolution.

Pour le moment, le bloc central, les Républicains et les socialistes ne souhaitent pas une dissolution. Mais, La France Insoumise et le Rassemblement national ont déjà indiqué qu’ils étaient prêts à retourner faire campagne.

Selon Benjamin Morel, constitutionnaliste, si Emmanuel Macron veut dissoudre l’Assemblée nationale, il a jusqu’au 15 novembre pour le faire. Le budget serait alors relégué aux calendes grecques.

Si on peut comprendre le désir des députés de vouloir argumenter sur les sujets qui leur tiennent à cœur, force est de constater que les débats se sont totalement enlisés et pour pas grand-chose, vu le peu d’amendements qui ont été adoptés ce lundi 27 octobre 2025.