Commission d’enquête TNT : un rapport suivi d’un Big Bang ?

Aurélien Saintoul, rapporteur de la commission d'enquête sur la TNT
Aurélien Saintoul, rapporteur de la commission d'enquête sur la TNT

La commission d’enquête sur l’attribution, le contenu et le contrôle des autorisations de services de télévision à caractère national sur la télévision numérique terrestre tire sa révérence avec la publication de son rapport d’enquête. 

Si le contexte de sa création pouvait laisser craindre une cabale envers les chaînes du groupe Bolloré, la commission a établi un bilan assez objectif du paysage audiovisuel français, disponible sur la TNT. Les propositions sont coupées en deux : celles de la commission dans son ensemble et celles du rapporteur à titre personnel. Notons aussi que l'attitude de Quentin Bataillon sur la fin de la commission d'enquête n'a pas aidé à apaiser les esprits. C'est la première fois qu'une présidente de l'Assemblée nationale est obligée de rappeler un député à ses obligations en la matière.  

Ces dernières ont donné lieu à un psychodrame la semaine dernière, au point qu’une rumeur disait que le rapport ne verrait pas le jour. Pourtant, elles n’ont rien de révolutionnaire ou de scandaleux. Tout au plus, peut-on arguer qu’elles sont le reflet d’un positionnement politique, mais, personne n’a jamais dit que les propositions émises dans le cadre d’une commission d’enquête parlementaire devaient être politiquement neutres. 

Si les auditions des acteurs du groupe Bolloré ont beaucoup fait parler, tout comme celle de Yann Barthès, ce sont bien toutes les chaînes gratuites de la TNT qui ont été passées au crible et le rapport fait écho à un autre sujet : la concentration des médias. Ainsi, la commission semble reprendre le constat opéré par Patrick Eveno (docteur en histoire et spécialiste des médias), à savoir qu’une chaîne de la TNT ne peut pas exister en dehors des grands groupes « avec au plus 3 % d’audience, vous ne drainez pas suffisamment de publicité pour financer une chaîne de télévision gratuite ».

Dès lors, au-delà de la concentration des médias, c’est aussi une certaine homogénéité des contenus qui est relevée par la commission, car elle rassure les annonceurs. Les mêmes types de contenus sont donc proposés ad nauseam, au détriment de la prise de risque, avec un biais sociologique « Ainsi, il apparaît que les programmes de la TNT “pensés par les catégories sociales supérieures dirigeant les chaînes sont donc très segmentés, parfois avec des représentations stéréotypées, que l’on imagine être les attentes des catégories populaires”.

Cela se traduit aussi par une uniformisation de l’information et la commission relève une hypertrophie de la couverture de certains évènements, notamment entre BFM TV et CNews, alors que LCI se démarque avec son traitement de l’actualité internationale. Parmi les sujets délaissés par les chaînes d’information : la délinquance et la criminalité en col blanc. Motif : des temps d’investigation plus longs, donc plus coûteux. Pourtant, ce type de contenus intéresse les Français et on peut se fier aux audiences de Cash Investigations ou Envoyé Spécial ou certaines soirées Thema d’Arte. 

Fondamentalement, la commission souligne l’absence de prises de risque de la part des chaînes de télévision qui émettent sur la TNT et l’absence d’originalité. 

À ce stade, toute la question est : ce rapport sera-t-il suivi d’effets ? On peine à y répondre et pour cause. En dehors de la proposition de loi sur l’audiovisuelle, on sait qu’un grand projet de loi sur l’information doit voir le jour en 2025. Mais, personne n’en connaît les contours exacts et Rachida Dati ne paraît toujours pas avoir trouvé ses marques au ministère de la Culture. 

La commission sera dissoute dans les prochains jours. Le rapport et l’ensemble des auditions sont disponibles ici.