Laporte, la vice-présidente dont les députés rêvent qu’elle la prenne

Au bout de deux ans de mandat, Hélène Laporte n'est toujours pas niveau.
Au bout de deux ans de mandat, Hélène Laporte n'est toujours pas niveau.

Si l’Assemblée nationale doit élire une personne pour chapeauter l’ensemble de l’institution, elle est secondée par des vice-présidents. Ces derniers secondent ou suppléent le Président de l’Assemblée nationale, notamment dans la présidence des séances. 

Ils sont élus par les députés, chaque groupe, en fonction du nombre de ses membres pouvant « envoyer » une ou plusieurs personnes. Pour la XVIe législature, ce sont cinq femmes et un homme qui se partagent la gestion des séances. Valérie Rabault pour le groupe socialiste, Élodie Jacquier-Laforge pour le MoDem, Naïma Moutchou pour Horizons, Caroline Fiat pour La France Insoumise, Sébastien Chenu et Hélène Laporte pour le Rassemblement National. 

À chaque président, son style et sa marque de fabrique. Avant de présider leur toute première séance, les vice-présidents reçoivent évidemment un règlement de l’Assemblée nationale, mais aussi un guide de présidence. Ils sont aussi assistés par des agents de l’Assemblée nationale, qui sont installés physiquement derrière eux au perchoir. 

Sur ces six vice-présidents, il n’y avait que Mme Laporte qui n’avait aucune expérience de l’Assemblée nationale. Cela s’est beaucoup vu sur les premières séances qu’elle a présidées. Écorchant les noms des députés, se trompant dans les amendements, elle n’était pas au niveau. Le problème est qu’elle n’est toujours pas au niveau, après quasiment deux ans de mandat

Ainsi, elle oublie régulièrement de faire voter des amendements ou de demander l’avis d’un ministre ou d’un rapporteur. Elle assène un vibrant « rappel au règlement » à Louis Boyard, chose qui n’existe pas dans le règlement de l’Assemblée nationale*. Elle décide de sa propre initiative, sans concertation avec les groupes de ne prendre qu’une prise de parole par position, sur un texte qui nécessite des développements. La liste est très longue. 

Certaines séances, comme celle du jeudi 14 mars 2024, ressemblent à une succession de rappels au règlement et d’interruption de séance. 

L’exemple le plus récent est celui de la séance du mercredi 27 mars 2024. Après l’examen de la proposition de loi de Sacha Houlié sur les ingérences étrangères, les députés se sont penchés sur un texte sur le bénévolat dans la sécurité civile. L’hémicycle était clairsemé**, le sujet relativement consensuel, les députés détendus. La séance aurait dû se passer dans un calme presque sénatorial. 

Pourtant, tout a dérapé. Deux députés ont décidé de régler leurs comptes pendant la séance, chacun se lançant des anathèmes à la figure, sur un sujet local. Résultat : plusieurs députés se sont énervés, dont un qui a clairement balancé un « on s’en fout ! » bien audible depuis les tribunes de la presse. Qu’aurait pu faire, pour empêcher ce dérapage, la présidente de séance Hélène Laporte ? Rappeler aux députés qu’ils s’écartaient du sujet. Mais, l’algarade s’est poursuivie, au point d’entraîner un incident de séance et une interruption de dix minutes. On pouvait se poser la question : est-ce le style de la présidente qui en cause ou les députés ? 

« Moi, par définition, j’aime bordéliser les séances, mais quand c’est Laporte, j’y vais encore plus franchement » glisse goguenard un député. 

Faut-il voir une forme de misogynie ? L’argument pourrait se tenir si une certaine tendance ne se dessinait pas dans les réponses des députés. 

« Caroline Fiat est top et elle est totalement impartiale. Pareil pour Naïma Moutchou. Élodie Jacquier-Laforge est un peu faible. Sébastien Chenu aussi préside bien. La seule qui pose un problème, c’est Hélène Laporte » explique un autre député. « Je comprends la position de la présidente de l’Assemblée nationale, qui défend ses vice-présidents et elle a raison de le faire ». Mais, on sent qu’un changement dans les vice-présidences ne l’empêcherait pas de dormir. 
Pour la misogynie, on repassera. Est-ce le parti politique de la vice-présidente Laporte qui justifie une certaine hostilité à son égard ? Là encore, on ferait fausse route.

Au sujet de Sébastien Chenu, un autre élu abonde « on ne peut pas lui reprocher quoique ce soit en tant que vice-président : il fait le job. ». 

Au fil des réponses des députés, un plébiscite en faveur de Caroline Fiat et de Naïma Moutchou se dessinent clairement. Elles sont les vice-présidentes préférées des députés. Chacune dans un style différent, mais, qu’ils soient dans l’opposition ou la majorité, homme ou femme, primo députés ou vieux briscards, ils donnent tous les mêmes réponses. 

À l’inverse, tous reconnaissent une certaine fragilité à Élodie Jacquier-Laforge, qui a mal géré l’incident Dupond-Moretti et son fameux bras d’honneur. Mais, ils sont aussi tous d’accord pour dire que Laporte est une présidente de séance médiocre, à tel point que certains se font un malin plaisir à chahuter les séances, comme notre député sale gosse. 

« Pour la semaine dernière, c’est simple. On avait deux incompétentes : Sabrina Agresti-Roubache au banc des ministres et Hélène Laporte au perchoir. Forcément, la séance ne pouvait que mal se passer » lâche railleur un cador du Palais Bourbon. 

Reste à savoir si Hélène Laporte restera vice-présidente durant la totalité de la XVIe législature ou si son groupe va discrètement l’exfiltrer pour envoyer quelqu’un qui n’oubliera pas de faire voter les amendements. 


* Quand un président de séance doit sanctionner un député, il fait un rappel à l'ordre ou un rappel avec inscription au procès-verbal. Ce sont les députés en hémicycle qui font des rappels au règlement.

** Comme de coutume, pendant la séance en hémicycle se tenaient des réunions de commissions, de délégations et diverses autres réunions.