Le top et le flop de la semaine — édition du 13 septembre 2024
Les députés sont toujours en repos forcé du fait de l’absence de gouvernement. Cela ne les empêche pas de se faire remarquer, souvent pour le pire.
En attendant Barnier
Il a fallu quasiment deux mois au président de la République pour sortir un nom de son chapeau pour occuper Matignon. À l’incompréhension générale, Michel Barnier a pris la suite de Gabriel Attal, lors d’une passation de pouvoirs à la saveur douce-amère.
Hélas, les Français n’ont pas fini d’attendre, car, il faut composer un gouvernement. Plusieurs noms circulent allègrement dont celui de Bruno Retailleau, d’Annie Genevard ou encore de François-Xavier Bellamy, tous parlementaires.
Mais, il y a un hic. Bruno Retailleau, sénateur de son état, est aussi président de groupe. Intégrer le Gouvernement, c’est prendre le risque de perdre cette présidence lorsqu’il tombera. Même problème pour Annie Genevard : redevenue vice-présidente de l’Assemblée nationale, son entrée au Gouvernement lui ferait perdre ce poste, sans aucune garantie de récupération. Point de procédure : cela entraînerait une nouvelle élection pour occuper ce poste qui serait devenu vacant. Quand on se souvient de la dernière élection pour les vice-présidents de l’Assemblée nationale, on en a des sueurs froides.
Quant à François-Xavier Bellamy, il perdrait définitivement son mandat de député européen. En effet, s’il entre au Gouvernement, il ne pourra pas retourner au Parlement européen lorsqu’il ne sera plus ministre.
Parmi tous les noms qui circulent, le seul qui aurait réellement quelque chose à y gagner est Olivier Marleix. Précédemment président du groupe Les Républicains à l’Assemblée nationale, il est redevenu un député comme les autres pour cette XVIIe législature. Sauf si Laurent Wauquiez décide de se renier.
Laurent Wauquiez, le reniement permanent
Participer au Gouvernement ? Hors de question claironnait Laurent Wauquiez lors de la rentrée des députés au début du mois de juillet, lors d’une pseudo-conférence de presse organisée à l’arrache. Mais, souvent Laurent Wauquiez varie, bien fol qui s’y fie.
Depuis la nomination de Michel Barnier, il a changé d’avis et se verrait bien titulaire d’un portefeuille ministériel et pas n’importe lequel. Il lorgnerait Beauvau. Dans cette hypothèse, Olivier Marleix pourrait tenter de récupérer son fauteuil de président.
Quant à l’hypothèse d’un Laurent Wauquiez ministre, on s’interroge sur les dépenses qu’il pourra engendrer.
Laurent Wauquiez et l’argent public : une histoire d’amour
On savait que Laurent Wauquiez aimait l’argent public et qu’il avait le goût du secret. Comme le rapporte Ouest-France, Médiacités Lyon a demandé les notes de frais de celui qui a été président de la région Auvergne Rhône-Alpes. Cela s’est terminé devant le tribunal administratif, qui a donné raison à nos confrères.
Pour autant, Laurent Wauquiez a décidé de ne pas obtempérer et de se pourvoir en cassation. Sur quelles bases ? On ne le sait pas encore.
Néanmoins, on reste dubitatif : pour quelqu’un qui veut tellement être au premier plan, il est bien secret sur ce qui relève du débat public.
Christine Engrand, la député qui doit moins travailler pour s’occuper de ses chiens
En matière de frais de mandat, en neuf ans d’existence, le Projet Arcadie en a vu défiler des vertes et des pas mûres. Mais, la prouesse artistique de Christine Engrand risque de rester un bon moment dans le top 10 des excuses les plus foireuses qu’on ait pu lire.
Nos confrères de Mediapart ont mis la main sur les frais de mandat de la député du Pas-de-Calais. On rappelle que les frais de mandat sont l’équivalent des frais professionnels. Ainsi, on a pu découvrir que frais professionnels rimaient avec site de rencontre, obsèques et gardiennage de toutous.
Terminée la créativité comptable, mais pas la paresse « Je faisais garder mes deux chiens du mardi au vendredi. Maintenant, je ne reste plus que deux jours à l’Assemblée parce que je n’ai pas d’autres moyens de faire garder mes chiens ».
Au regard de son communiqué de presse, on ne peut que conseiller à Christine Engrand d’utiliser ses frais de mandat pour acquérir une licence Antidote.
Éric Ciotti, le traître pris en traître
S’il y en a un qui doit se mordre les doigts, c’est bien Éric Ciotti. Souvenez-vous. Après avoir fait un stage intensif façon zadiste de Notre-Dame-Des-Landes au siège des Républicains, il avait fait alliance avec le Rassemblement national pour les législatives de 2024.
Ayant réussi à sauver les meubles, il a constitué un groupe fort de 16 députés et devait se trouver quelque peu rassuré de voir que Laurent Wauquiez refusait toute participation au Gouvernement.
Mais, depuis que Michel Barnier est entré en piste, les choses ont changé et là, Éric Ciotti a compris son erreur. Lui qui rêve de Beauvau, vient de faire une erreur de calcul magistrale. Car, si Michel Barnier devra vraisemblablement négocier avec le Rassemblement national sur certains textes, notamment le budget, faire entrer des membres de l’extrême-droite dans son gouvernement lui vaudrait une motion de censure immédiate, aussi bien de la gauche que du centre. Même pour un sous-secrétariat d’État aux petits farcis.
Comme quoi, être dans la cuisine politicienne depuis 1995 ne garantit pas de réussir à fourguer sa daube.
Jérôme Nury, le député contre le parachutage
Drôle de période oblige, les députés sont beaucoup moins prolixes en propositions de loi que par le passé. Néanmoins, Jérôme Nury en a déposé une cette semaine. Le titre est plus long que le contenu de la proposition de loi. Objectif : que les candidats résident dans l’une des communes où ils se présentent comme député.
Si l’intention est louable, elle n’échappe pas à un détail : que faire des Français de l’étranger ? En effet, selon nos informations, en dehors de Stéphane Vojetta dont la résidence principale est bien à Madrid, tous les autres députés représentant les Français hors de France, sont établis en France.
Autre détail amusant : le cas de Nicolas Metzdorf. Souvenez-vous : lors de la XVIe législature, il était député de la deuxième circonscription de la Nouvelle-Calédonie. Il a opportunément changé de circonscription pour briguer la première, où le contexte lui était plus favorable.
Relevons que la proposition de loi de Jérôme Nury n’a quasiment aucune chance d’aboutir.
Jean-Luc Warsmann, celui qui veut faire bosser le Gouvernement pour de vrai
Le grand public ne connaît pas Jean-Luc Warsmann, député depuis la Xᵉ législature — il en est à son huitième mandat. Plutôt sérieux, il dépose régulièrement des propositions de loi constitutionnelle. Mais, celle qui a attiré notre attention est la proposition de loi constitutionnelle visant à instaurer un délai maximal obligatoire de publication des mesures d’application des lois.
Comme le montre le baromètre de la loi, si les parlementaires sont obligés de légiférer à la hâte, en dépit du bon sens, le Gouvernement procrastine allègrement quand il s’agit de prendre les décrets d’application des lois. Résultat : les lois ne sont tout simplement pas appliquées.
Ainsi, Warsmann propose de modifier la Constitution, pour y ajouter un délai de six mois. Si on salue l’initiative, on doute de ses chances de succès. Cela prouve néanmoins qu’il reste des députés qui ont compris quel était leur rôle. Ce n’est pas le cas de tout le monde.
Sébastien Delogu, le calendrier de l’avent
Durant l’été, Ersilia Soudais s’était distinguée par sa capacité à tweeter sans trop réfléchir. Il faut croire que son collègue Sébastien Delogu a décidé de prendre le relais. Lors d’une séance en commission des finances, ce dernier a tenté une sortie enflammée contre Bruno Le Maire. Problème : il n’avait manifestement pas « répété » son texte et on doute même qu’il en soit l’auteur. Victime d’un montage vidéo où son débit était ralenti, il a dit tout le bien qu’il pensait de ceux qui avaient partagé le montage, au micro de Jean-Jacques Bourdin, chez Sud Radio.
Mais, le problème est qu’il a voulu donner dans l’ironie en disant, dans le contexte de l’interview, qu’il ne savait pas vraiment qui était Pétain (à partir de 16 : 57). Quelques recherches sur son compte X (anciennement Twitter) montrent qu’il sait parfaitement qui était Philippe Pétain. Néanmoins, il a voulu faire de l’esprit.
Pour cela, encore faut-il en avoir et ce n’est pas son principal trait de caractère.
Cela ne s’arrête pas là : cette semaine, au cas où on avait oublié la pitrerie dont il nous avait gratifiés en hémicycle avec un drapeau palestinien, il a écrit à la Présidente de l’Assemblée nationale, pour en demander la restitution. Refus catégorique de l’intéressée, qui doit se demander si elle est député ou assistante maternelle.
Malheureusement pour nous, Yaël Braun-Pivet ne peut pas distribuer des heures de colle ou mettre les députés au piquet.