Le top et le flop de la semaine — édition du 20 septembre 2024
Ce n’est pas parce qu’il n’y a toujours pas de Gouvernement que les parlementaires n’ont pas trouvé de quoi s’occuper.
Christine Engrand : tout comme la patronne
Christine Engrand aurait au moins pu avoir la gentillesse de commettre son infraction mercredi dernier, ce qui nous aurait permis de l’intégrer dans l’édition de la semaine dernière. Nous sommes donc contraints de la faire revenir en deuxième semaine, cette fois-ci, pour un délit routier.
Comme nous l’apprennent nos confrères du Parisien, la député du Pas-de-Calais conduisait sans permis, dans un véhicule qui n’était pas à jour de contrôle technique, le tout en étant au téléphone.
Plus inquiétant, elle ne possède plus de permis de conduire depuis 2009, ce qui signifie qu’elle roule sans titre depuis 15 ans. Marine Le Pen proposait de mettre fin au retrait de point pour les petits délits routiers, parmi lesquelles elle comptait le défaut de permis de conduire. Il est vrai qu’elle avait, elle aussi, perdu son permis de conduire.
Christine Engrand pourra toujours arguer qu’elle a suivi l’exemple de la cheffe.
Le RN propose Musk pour le prix Sakharov
On s’est frotté les yeux devant l’annonce tonitruante de Thierry Mariani : le groupe des Patriotes pour l’Europe — nom du groupe dans lequel siègent les députés européens RN au Parlement européen — a proposé le nom d’Elon Musk pour le prestigieux prix Sakharov.
Il s’agit de récompenser des personnalités qui ont contribué de manière exceptionnelle aux libertés fondamentales. Dans les lauréats, on compte Nelson Mandela, Malala Yousafzaï, Denis Mukwege ou encore Nadia Mourad.
On concède qu’on ne voit pas quel est l’apport positif à l’Humanité d’Elon Musk.
Inéligibilité des fichés S : la brillante idée de Christelle Petex
Histoire de ne pas friser le bore out, les députés commencent à remplir le dépôt des propositions de loi, avec des idées parfois farfelues. Celle de Christelle Petex en fait partie. Sa proposition consiste à rendre inéligibles les personnes dont le casier judiciaire ne serait pas vierge ou qui seraient inscrites « dans la catégorie “atteinte à la sûreté de l’État” ».
Traduction : interdire aux personnes fichées S de se présenter à tout mandat électoral. Ce qui nous fait furieusement penser au député Raphaël Arnault, dont il se dit qu’il serait dans ce cas de figure. Contacté, le bureau de la député indique qu’il ne s’agit pas de le viser lui nommément, mais, de répondre aux sollicitations reçues des citoyens sur ce sujet.
Problème : ce type de fichier n’est pas public et tout l’intérêt est justement que les personnes sous surveillance ne sachent pas qu’elles le soient. Or, comment garder le secret si au moment du dépôt de candidature, le dépôt est refusé ? On attend toujours la réponse à cette question.
Inclure les prisons dans les quotas HLM : les fantaisies foncières de Schreck
La loi SRU prévoit que chaque commune de France doit avoir un quota de logements sociaux sur son territoire. Objectif : que ce ne soit pas toujours les mêmes territoires qui aient la charge des populations les plus fragiles. Évidemment, toutes les communes ne jouent pas le jeu et préfèrent payer des amendes plutôt que de réserver du foncier.
Philippe Schreck a donc trouvé une parade : inclure les prisons dans les quotas HLM.
Ainsi que le prévoit l’article premier « Sont assimilés aux logements sociaux mentionnés au présent article les établissements pénitentiaires ». Curieuse démarche s’il en est sauf quand on regarde la carte de l’administration pénitentiaire. La ville de Draguignan compte une maison d’arrêt et un quartier centre pour peines aménagées ou structure d’accompagnement vers la sortie. Par un curieux hasard, cette même commune, qui compte approximativement 40 000 habitants, ne respecte pas son quota de 25 % de logements sociaux, puisqu’elle culmine à 18,05 % à la fin de l’année 2023.
Il se trouve que Philippe Schreck n’est pas seulement député du Var, il est aussi membre du conseil municipal de Draguignan. Parfois, il ne faut pas chercher très loin. Sollicité, le député n’a pas répondu à nos questions.
Martine Froger et les microentreprises : la déclaration de guerre
On ne l’avait pas forcément vu venir. Martine Froger a déposé une proposition de loi pour limiter le statut des microentreprises à deux ans. Motif invoqué : le statut très avantageux de ces derniers, qui feraient une concurrence déloyale aux autres professionnels. Au terme des deux ans, « le créateur d’entreprise pourra opter pour l’un des autres régimes existants, fort nombreux et parfaitement aptes à répondre à une grande diversité de situation ».
On a un scoop pour Mme Froger : si les microentrepreneurs ne changent pas de statut au bout de deux ans ou moins ou plus, c’est tout simplement parce que le changement fiscal plombe littéralement les revenus des entrepreneurs. Chez Arcadie, on est très bien placé pour le savoir dans la mesure où la simulation est faite tous les six mois, depuis sept ans. La microentreprise est le seul régime qui permet de gérer des revenus aléatoires.
Par ailleurs, bon nombre de créateurs de contenus – Youtubeurs, Twitcheurs et autres – optent pour ce régime, car leurs revenus sont entièrement dépendants des géants du numérique et de leur audience.
Enfin, on a du mal à percevoir quelle concurrence déloyale un microentrepreneur peut engendrer face à d’autres entreprises, dans la mesure où le chiffre d’affaires est plafonné, contrairement aux autonomos espagnoles et qu’on ne peut rien déduire, même pas sa mutuelle.
Le plus amusant est que l'argument de la concurrence déloyale est d'habitude utilisée par la droite. En effet, la sénatrice Else Joseph, dans une question écrite en 2023, se plaignait de la même chose et proposait aussi de limiter dans le temps la microentreprise. Comme quoi, il peut y avoir convergence des luttes entre la gauche et la droite, surtout quand il s'agit de taper sur les plus fragiles.
On rassure Martine Froger : le jour où on pourra changer de statut fiscal, sans se retrouver criblé de dettes, on le fera.
Philippe Juvin à la rescousse des personnes en situation de handicap
Pendant que certains font mumuse, d’autres ont décidé de s’attaquer aux vraies difficultés et cette semaine, c’est Philippe Juvin qui se distingue avec une problématique qui pourrit littéralement la vie des personnes en situation de handicap.
Le Canard Enchaîné se fait régulièrement l’écho de la torture administrative infligée par la MDPH (Maisons départementales pour les personnes handicapées) qui demandent tous les ans ou presque, divers justificatifs aux personnes atteintes d’affection de longue durée. On parle de personnes souffrant de pathologies qui sont incurables : maladie d’Alzheimer, de Parkinson, handicap lourd irréversible, etc. Grâce au journal satirique, les situations individuelles se débloquent, mais le sujet reste entier.
On comprend la volonté de lutter contre la fraude, mais la MDPH met jusqu’à six mois si ce n’est plus à traiter les dossiers de renouvellement. Durant ce laps de temps, les personnes ne perçoivent plus les indemnités auxquelles elles ont légalement le droit, créant des situations totalement inhumaines, sur un public déjà fragilisé.
On ne sait pas si le texte arrivera dans la niche LR ni s’il sera porté par le Gouvernement — quand il y en aura un — mais il est susceptible de rencontrer une très large adhésion parmi les groupes. À charge pour Juvin d’aller faire la tournée des bureaux pour faire remonter dans l’agenda son idée.