Les députés doivent-ils migrer sur Mastodon ?

Mastodon contre Twitter
Le compte Mastodon du Projet Arcadie

Le réseau social décentralisé Mastodon fait figure de remplaçant idéal à Twitter. Son fonctionnement est à peu près maîtrisé par les utilisateurs du logiciel libre, les autres en sont encore à comprendre son système, notamment en raison de la décentralisation des instances. 

Les difficultés intrinsèques à Mastodon

Premier problème auquel vont être confrontés les politiques : le choix de l’instance. Sur Twitter, la problématique n’existait pas. Sur Mastodon, on doit choisir son instance, en tenant compte surtout des règles de modération. Certaines instances interdisent la politique, d’autres la publicité, etc. Chaque administrateur est libre dans l’établissement des règles. Pour faire un parallèle avec le monde physique, on dira que chaque instance Mastodon est une maison. Dans certaines maisons, vous devez enlever vos chaussures avant d’entrer, tout dépend des règles fixées. Mastodon fonctionne sur le même modèle. 

Les politiques peuvent aussi créer leur propre instance, par exemple, celle du parti politique. Cela suppose — et c’est le deuxième gros problème — d’avoir les compétences techniques nécessaires pour créer, administrer et gérer une instance. Notons que ce n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît et qu’il existe des problématiques, notamment en lien avec la sécurité informatique et le RGPD, qui ne sont pas à négliger. 

Troisième problème, dans l’hypothèse où les politiques créent des comptes sur des instances qui seraient gérées par leur parti ou leur groupe parlementaire : les désaccords politiques. Que se passerait-il si un député qui appartient à un groupe décide de quitter son groupe ? Doit-il quitter l’instance ? Se créer un nouveau compte ?

On pourrait résoudre le problème en se disant que l’Assemblée nationale et le Sénat pourraient créer leurs propres instances. Mais, que se passerait-il quand le parlementaire n’est plus en fonction ? Quid de ses données ? De son compte ? Cela suppose également que les deux maisons créent des postes pour gérer les instances. 

Quatrième problème : la gestion au quotidien. Autour de Twitter s’est construit tout un écosystème d’outils de suivi statistique. On pense évidemment à la fonctionnalité native, mais aussi d’autres outils de monitoring et de suivi, notamment pour le suivi des tendances, le nombre de followers, etc. Ces outils n’existent pas pour Mastodon, tout comme il n’existe pas encore d’outils grand public pour programmer l’envoi des messages. Qu’on se rassure : ça se code, mais ça demande un peu d’huile de coude. 

Au regard des difficultés, on peut aussi se dire que les politiques n’ont rien à gagner à migrer vers Mastodon ou au moins, s’y faire un compte. Ce n’est pas tout à fait vrai.

Les atouts du mammouth

Globalement, Mastodon est une communauté plus engagée et plus marquée politiquement. Les gens y sont plus réactifs, moins attentistes. Selon le type d’électorat qu’on vise, pour les élus, il peut être intéressant de s’y installer. Par contre, le buzz y est moins présent. C’est plus reposant. 

L’une des raisons est que le « subtweet » n’existe pas. On peut insérer un lien ou une image, mais le subtweet, tel qu’il existe sur Twitter, n’est pas une fonctionnalité de Mastodon. Cela permet de diminuer la charge négative. 
Comme ce réseau social est moins exposé que Twitter, les petites phrases idiotes n’ont pas le même impact que sur Twitter. Cela passe clairement sous les radars médiatiques et de ce point de vue, c’est reposant. 

Autre avantage indéniable : pas de Cyril Hanouna sur Mastodon ni autre créature de la télépoubelle sur ce réseau social. Sociologiquement, les adeptes de Mastodon sont plutôt des auditeurs de France Inter, des lecteurs de Mediapart et des téléspectateurs d’Arte. Sans aller jusqu’à dire que le niveau intellectuel est supérieur à Twitter, on conviendra qu’il est reposant d’avoir un réseau social sans télépoubelle. 

Comment ne pas parler des deux plus gros atouts de Mastodon ? En premier, la possibilité de corriger ses messages après envoi. On fait tous des coquilles, des fautes d’accord ou de syntaxe. Tous les utilisateurs l’ont réclamé, mais Twitter ne l’a jamais créé. Sur Mastodon, on peut le faire. Tout comme on peut aller au-delà des 280 caractères. Qui n’a jamais amendé un message — avant envoi — pour essayer de caser tout un propos en 280 caractères ? Sur Mastodon, la limite est de 500, ce qui est plus confortable. 

Alors, les politiques ont-ils intérêt à se mettre sur Mastodon ? À ce stade, on dira que cela peut être un bon exercice pour celles et ceux qui ont le goût des réseaux sociaux. Pour celles et ceux qui ont déjà dû se forcer pour s’inscrire sur Twitter, ce n’est peut-être pas encore le bon moment pour sauter le pas. 

 

Commentaires

Plutôt que se demander sur quelle instance les politiques peuvent s'inscrire, ils n'ont qu'à créer la leur. C'est un logiciel qui peut être hébergé sur un serveur domestique. L'Assemblée nationale et le Sénat et même chaque parti politique devrait avoir son propre serveur de manière a avoir un contrôle total tout en définissant sa politique de modération.

En premier lieu, pardon pour le délai de réponse, je n'avais pas vu que j'avais un commentaire en file d'attente de la validation. 

Je suis d'accord sur l'auto-hébergement mais cela demande des compétences, notamment en ce qui concerne la sécurité des données, la disponibilité, etc.

Même si l'informatique a été démocratisée, gérer au quotidien un service n'est pas aussi simple que de faire une omelette.