Sacha Houlié dépose sa proposition de loi visant à lutter contre les ingérences étrangères

Pour prévenir les ingérences étrangères, Sacha Houlié prévoit encore plus de surveillance électronique.
Pour prévenir les ingérences étrangères, Sacha Houlié prévoit encore plus de surveillance électronique.

C’était très attendu : Sacha Houlié a enfin déposé sa proposition de loi visant à prévenir les ingérences étrangères.

On se souvient que la commission d’enquête parlementaire sur cette thématique à l’Assemblée nationale n’avait rien donné de concret, si ce n’est une sinistre farce au détriment des institutions. Puis, la délégation parlementaire au renseignement avait aussi planché sur cette question, mais, sans que quoi que ce soit ne voit le jour.

À l’époque, Sacha Houlié avait laissé sous-entendre qu’il déposerait une proposition de loi sur cette thématique. Sollicité à plusieurs reprises, il a refusé de donner suite pour en parler. Entre-temps, la sécurité extérieure de l’Union européenne a, elle aussi, tiré la sonnette d’alarme, invitant les États membres à se pencher sur ce sujet et à prendre des décisions.

Vu le temps, on s’attendait à quelque chose de très costaud. Les espoirs seront très vite douchés : la proposition de loi est assez modeste

L’article premier propose — enfin — de créer un registre des agents étrangers, sur le modèle du FARA. Comme expliqué et détaillé dans le livre, le jeu des ombres : les ingérences étrangères à ciel ouvert, il s’agit d’une base de données américaine, listant toutes les personnes travaillant pour un État étranger. Ainsi, les Américains ont tout le loisir de consulter ce registre, pour savoir qui reçoit de l’argent de la Fédération de Russie, par exemple. 

Ce registre serait confié à la HATVP et surtout, il serait public. Pour autant, le texte ne prévoit aucune extension des effectifs de l’institution. Autre problème : la proposition de loi se restreint aux seuls représentants d’intérêts — comprendre les lobbyistes — et ne définit pas ce qu’est un mandant étranger. Or, il n’y a pas que les représentants d’intérêts qui agissent pour le compte d’un État étranger, mais aussi des journalistes, des médias, des influenceurs, des chefs d’entreprise et même des élus. Restreindre au seul champ d’application de cette loi les représentants d’intérêts vide la proposition de sa pertinence. 

L’article 2 prévoit la remise d’un rapport annuel, par le Gouvernement au Parlement, sur l’état des menaces qui pèsent sur la sécurité nationale, en incluant les ingérences étrangères. Ce rapport pourrait faire l’objet d’un débat. 

Alors qu’absolument personne ne demandait cet ajout, l’article 3 de la proposition de loi instaure un élargissement des techniques de captation et des techniques de renseignement « dite de l’algorithme » — cela ne veut rien dire, mais comprendre « surveillance des télécommunications de la façon la plus large possible » — aux personnes soupçonnées d’ingérence étrangère, par les services de renseignement. 

Enfin, l’article 4 prévoit une modification du Code monétaire et financier pour élargir aux ingérences étrangères le gel des avoirs. 

C’est une proposition de loi très pauvre, comportant des risques en matière de vie privée et ne répondant que très partiellement à la question des ingérences étrangères en France. Le texte vient d’être versé au dépôt de l’Assemblée nationale. Il sera examiné par la commission des lois, qui doit l’inscrire à son agenda. 

Il est assez navrant de constater qu’en dépit des travaux qui ont été menés jusqu’à présent, y compris dans d’autres pays, cette proposition de loi soit aussi légère sur ce sujet.