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George Simion semble faire figure de favori pour l’extrême droite Roumaine. Enquête sur un candidat sulfureux.
International

George Simion, le candidat aux multiples dossiers judiciaires

Exit Georgescu pour représenter l’extrême-droite dans la course présidentielle en Roumanie, place à George Simion, président du parti AUR et figure montante de la sphère souverainiste et populiste en Europe.

Qui est George Simion ?

Né à la fin de la dictature de Ceaușescu, Simion fait des études de commerce et d’administration. Il se fait remarquer dès les années 2006, en plaidant pour que la Bessarabie — région qui appartient à la Moldavie — soit réintégrée dans la Roumanie. Ses différentes opérations et manifestations lui valent une interdiction d’entrée sur le territoire de Moldavie en octobre 2018 pour une période de cinq ans.

En février 2024, la République de Moldavie publie une liste de 98 personnes indésirables sur son territoire. George Simion y figure, ayant gagné cinq années supplémentaires, en raison de ses liens avec les services secrets russes. En effet, la Moldavie fait l’objet d’agressions répétées et permanentes de la part de la Russie depuis les années 90.

Il devient député en 2020 et se fait réélire à la fin de l’année 2024, ayant échoué à se qualifier pour le second tour de l’élection présidentielle, grâce à Georgescu.

AUR, un parti qui prend sa place dans la sphère nationaliste et souverainiste en Europe

AUR envoie des députés européens lors des élections de juin 2024 et intègre l’ECR, groupe parlementaire qui regroupe plusieurs partis d’extrême-droite en Europe et figures connues telles que Marion Maréchal.

Mais, Simion ne dédaigne pas les relations outre-Atlantique et comme en attestent les photos qui figurent sur son site Web, il s’affiche à l’investiture de Donald Trump en janvier 2025 ainsi qu’auprès de JD Vance. Tout ce qui ressemble à une forme de populisme, teinté de religion lui plaît.

Il faut dire que le candidat aime afficher ses valeurs chrétiennes, jusqu’à l’outrance.

Instrumentalisation de l’orthodoxie

George Simion est orthodoxe et fier de l’être, comme bon nombre de Roumains. Dès lors, sur ses réseaux sociaux, dans ses déclarations publiques et ses articles de son site, il n’hésite pas à convoquer tout ce que la religion orthodoxe compte comme saints et comme symboles religieux.

La ficelle peut paraître grosse pour les Français ou la jeune diaspora, elle a un intérêt électoral. Durant la dictature, tout ce qui pouvait relever de la manifestation religieuse a plus ou moins été banni de la sphère publique et si Ceaușescu n’a pas rasé toutes les églises, c’est tout simplement parce qu’il n’en a pas eu le temps.

Mettre en avant sa religiosité, c’est gagner des votes dans les campagnes et auprès d’un électorat dont la foi a été brimée durant de nombreuses années. Pour autant, la politique n’est jamais loin, même dans l’exercice religieux.

Une cérémonie de baptême de 1000 personnes et un cadeau de mariage à 400 000 €

George Simion est marié à Ilinca Valentina Simion, Ilinca Valentina Munteanu de son nom de jeune fille. De onze ans sa cadette, la jeune femme se marie avec lui en août 2022. Mais, pas de cérémonie en petit comité avec quelques amis et la famille proche pour les Simion. Plusieurs milliers de personnes ont assisté à la noce.

Pour cette cérémonie, les époux Simion ont reçu 400 000 € en cadeau. Ce qui pose un problème : la loi roumaine impose une déclaration fiscale à partir de 5 000 € de dons. Dans la presse à scandale, Simion a indiqué que cet argent aurait servi à payer la réception. Mais, personne ne sait qui a donné combien.

Rebelote en 2024 avec le baptême de leur premier enfant. George Simion invite toute la Roumanie pour reprendre ses mots, pour finalement se contenter de mille personnes, reçus dans l’une des propriétés de son ami le député Petrica Negrea, qui possède une dizaine de biens immobiliers et de terrains.

Pour cette cérémonie, les gains ont été plus modestes : seulement 60 000 €. Les deux évènements ont été abondamment photographiés et relayés dans les tabloïds et sur les réseaux sociaux. Là encore, il indique que cette somme aurait servi à financer la fête et personne n’a la trace de qui a donné combien et comment.

Un très curieux dossier de candidature

Tous les candidats doivent soumettre un dossier au Bureau Central des Élections (BEC), dans lequel doivent notamment figurer une déclaration de patrimoine et une déclaration d’intérêts. Celle de Simion soulève bien des interrogations.

Premier sujet d’étonnement : le candidat ne déclare aucun compte bancaire, même courant, que ce soit pour lui ou pour son épouse. Pourtant, en tant que député, son indemnité parlementaire doit être versée sur un compte bancaire. Il ne peut pas aller à un guichet du Palais pour retirer en espèce la somme correspondante. Par ailleurs, son épouse perçoit des allocations familiales. Ces dernières peuvent perçues par chèque ou par virement. Dans les deux cas, il faut un compte en banque.

Le guide de déclaration est formel : les comptes bancaires des conjoints doivent apparaître et l’épouse de Simion, bien qu’étant en congé maternité a probablement reçu de l’argent pour le livre qu’elle a écrit l’année dernière, sorti en janvier 2025. Ce qui amène à une autre question : les sommes reçues pour les deux réceptions ont-elles été intégralement perçues en liquide ? Les fournisseurs et prestataires ont-ils été payés en liquide ?

Des biens qui disparaissent d’une année à l’autre

Les députés ont l’obligation de déposer une déclaration de patrimoine tous les ans. Dans ses précédentes déclarations, Simion indiquait un appartement de 44 m², une voiture et une hypothèque.

Dans la presse tabloïd, le candidat explique que l’appartement au nom de son épouse a été vendu et qu’il est à présent locataire. Là encore, on s’interroge : où est passé l’argent de cette vente et comment règle-t-il son loyer ?

Le candidat serait-il tout simplement fauché ? Rien n’est moins sûr.

Le compte Instagram d’Ilinca

Son épouse est beaucoup moins impliquée dans la politique, mais participe à la construction de son image de marque en tant que père de famille, aimant et responsable.

La jeune femme ne dédaigne pas les photos léchées, les beaux vêtements et les mises en scène en vidéo. L’une d’entre elles a attiré notre attention. Dans l’une de ses publications, elle se filme en pleine séance de maquillage : Ester Laudée, Dior ou encore Bioderma sont les marques visibles sur sa coiffeuse, toutes très chères en Roumanie.

On voit plusieurs palettes de maquillage, des pinceaux, bref, des produits de qualité, qui ne sont pas accessibles à toutes les bourses, que ce soit en France ou en Roumanie. L’appartement semble assez neuf et en très bon état. Les photos montrent des équipements impeccables et des jouets rutilants. On est très loin du couple qui ne parvient pas à boucler ses fins de mois.

Que peut bien cacher George Simion aux électeurs ? Alors que les autres candidats ont tous des comptes bancaires et des propriétés, lui parait être dans une apparente pauvreté, qui ne cadre pas du tout avec les publications Instagram et TikTok de son épouse. À moins que ces publications aient pour objectif de faire oublier le reste.

Des poursuites en cours

La déclaration de patrimoine de Simion est truffée d’omissions, au point qu’on en vient à dire qu’il a fait une Delevoye. Mais, ce ne sera peut-être pas son plus gros problème. Remus Pricopie, recteur du SNSPA — un Science Po local — a déposé plainte contre George Simion pour faux en écriture. Sur sa page Facebook, il indique qu’en raison de déclarations antérieures de Simion, il doute de la véracité des signatures, déposées dans son dossier de candidature. En effet, chaque candidat doit collecter 200 000 signatures de citoyens, pour appuyer le sérieux de sa candidature.

Si on peut voir dans cette plainte, une tentative de revanche d’un candidat malheureux d’avoir chuté sur cet obstacle — lui-même n’a pas récolté les signatures nécessaires — il n’en demeure pas moins vrai que dans le cas de Simion, ce ne serait pas la première fois.

Simion a été mis en examen en juin 2024 pour falsification de signatures pour la candidature de Silvestru Șoșoacă et comme il l’indique lui-même sur ses comptes de réseaux sociaux, l’affaire a été jugée suffisamment sérieuse pour que son téléphone portable soit confisqué. Sauf s’il a habilement utilisé des données qu’il avait déjà récoltées durant l’été 2024.

Le plan Simion : des appartements à 35 000 €

L’affaire est passée sous les radars français. Durant la campagne électorale de 2024, pour la présidentielle, la mesure phare de Simion se focalisait sur le logement. Ce qu’il a appelé le plan Simion consistait tout simplement à promettre un million de logements aux Roumains (en Roumanie), à partir de 35 000 € pour un deux-pièces de 50 m².

Pour cela, rien de plus simple : il suffisait de se présenter dans l’une des antennes du parti et de signer un contrat de quatre pages, sans oublier de laisser toutes ses coordonnées et de montrer sa pièce d’identité. Comme tous les autres pays d’Europe, la Roumanie connaît un problème de logement et le logement neuf est hors de portée de la plupart des ménages. Si Simion gagnait l’élection, tous les Roumains qui avaient signé le contrat auraient reçu un bien immobilier.

En dehors de la tactique pour récupérer des données personnelles des électeurs sur le territoire et les cibler — et ce ne sont pas les députés français, accros aux pétitions sur Change point org qui diront le contraire — la manœuvre semble aussi profiter au numéro 2 du parti : Marius Lulea, dont le cœur de métier est justement le développement de projets immobiliers à grande échelle.

Sur ce dossier, il n’y a pas eu d’ouverture d’enquête, car, il n’y a pas eu d’argent versé par les Roumains à AUR, contrairement au scandale Caritas qui a secoué le pays dans les années 90. Reste à savoir si Simion remettra son plan au goût du jour.

Une enquête ouverte pour violence

Suite au rejet de la candidature de Georgescu par le BEC, puis sa confirmation par la Cour constitutionnelle, George Simion a tenu des propos suffisamment violents pour que le parquet général se saisisse lui-même.

Dans un communiqué, la juridiction indique « Le Parquet près la Haute Cour de Cassation et de Justice a déposé une plainte d’office, le 10 mars 2025, concernant la commission du délit d’incitation publique, prévu par l’art. 368 alinéas 1 et 2 du Code pénal. En effet, il a été constaté que dans la soirée du 9 mars 2025, dans le cadre d’une manifestation qui a eu lieu à Bucarest, le président d’un parti politique, qui est également député au Parlement roumain, a fait une série de déclarations incitant à la violence ».

Si les candidatures sont désormais closes, il faut attendre encore quelques jours pour qu’elles soient toutes formellement validées. Pour le moment, les Roumains ont le choix entre huit candidats.

Sollicité par email, George Simion n’a pas répondu à nos questions.