Indemnités ministérielles, calendrier parlementaire, affaires courantes : tout savoir sur la démission du Gouvernement Lecornu
Sébastien Lecornu a remis la démission de son gouvernement, ce matin, lundi 6 octobre 2025, démission officialisée par communiqué de presse de l’Élysée à 9 h 48.

C’est l’occasion de répondre à certaines interrogations.
Les ministres nommés par Sébastien Lecornu, vont-ils exercer des fonctions ?
Oui. Dans l’attente de la nomination d’un Premier ministre et de son gouvernement, les ministres démissionnaires restent en fonction. Ils sont chargés des affaires courantes. Dans les faits, la majorité des ministres du gouvernement Lecornu 1ᵉʳ étant les mêmes que ceux du gouvernement Bayrou 1ᵉʳ, il n’y a pas de changement les concernant.
Qu’en est-il des secrétaires d’État, qui n’avaient pas encore été nommés ? Ce sont ceux du Gouvernement Bayrou 1ᵉʳ qui vont gérer, en attendant. Correction à 19 h 05 : les secrétaires d’État dépendant des ministres dits de plein exercice ou de plein portefeuille, ils ne sont plus ministres. Ceux qui étaient parlementaires, retournent dans leurs chambres respectives.
Les ministres du Gouvernement Lecornu 1ᵉʳ peuvent-ils gérer les affaires courantes alors qu’il n’y a pas eu de passation de pouvoir ?
Ce qui fait foi est la publication au Journal officiel. Or, il y a eu hier soir, une édition du Journal officiel, annonçant la composition du Gouvernement. Les ministres démissionnaires peuvent gérer les affaires courantes.
L’Assemblée nationale peut-elle siéger ?
Si on suit la lettre de la Constitution, la session ordinaire a commencé. Cette dernière commence le 1ᵉʳ octobre et s’achève le 30 juin. Mais, il faut un ou plusieurs ministres pour représenter le Gouvernement, même si les textes sont d’origine parlementaire.
Dès lors, ni l’Assemblée nationale ni le Sénat ne peuvent réellement travailler.
Que peuvent faire les parlementaires, en attendant la nomination d’un gouvernement ?
Une partie du travail des parlementaires consiste à contrôler l’action du Gouvernement et à évaluer les politiques publiques. S’ils ne peuvent pas légiférer ni contrôler le gouvernement actuellement, ils peuvent néanmoins procéder à des auditions et entamer les travaux des commissions d’enquête.
Ainsi, cette semaine, la commission d’enquête sur les liens existants entre les représentants de mouvements politiques et des organisations et réseaux soutenant l’action terroriste ou propageant l’idéologie islamiste devrait nommer son bureau. La commission d’enquête sur les dysfonctionnements obstruant l’accès à une justice adaptée aux besoins des justiciables ultramarins mène des auditions. Quant à la commission d’enquête sur les défaillances des politiques publiques de prise en charge de la santé mentale et du handicap et les coûts de ces défaillances pour la société, elle a programmé des auditions et des tables rondes.
Enfin, les parlementaires peuvent travailler en circonscription.
Que va-t-il se passer pour les députés qui viennent d’être nommés ?
Roland Lescure, Naïma Moutchou, Aurore Bergé, Éric Woerth, Marina Ferrari et Matthieu Lefèvre ont été nommés dans le Gouvernement Lecornu 1er. Dans une situation normale, ils auraient immédiatement pris leurs fonctions et leurs suppléants seraient arrivés dans un mois.
Or, il est probable que ces ministres retrouvent le chemin de l’Assemblée nationale dans un mois ou repartent en campagne. Dès lors, les suppléants ne siégeront probablement pas.
Les députés qui viennent d’être nommés ministres, sont-ils députés ou ministres ?
Roland Lescure, Naïma Moutchou, Aurore Bergé, Éric Woerth, Marina Ferrari et Matthieu Lefèvre, qui ont été nommés dans le gouvernement de Sébastien Lecornu sont ministres. Ils gèrent les affaires courantes en attendant la nomination d’un nouveau gouvernement.
À ce titre, ils ne perçoivent plus leurs indemnités parlementaires ni leur avance de frais de mandat. Leurs collaborateurs parlementaires sont dans une situation incertaine par contre.
Les ministres démissionnaires vont-ils percevoir les indemnités de départ liés à la fonction ministérielle ?
L’ordonnance n° 58-1099 du 17 novembre 1958 portant loi organique pour l’application de l’article 23 de la Constitution nous donne la réponse. Une indemnité est versée durant trois mois après la cessation des fonctions gouvernementales.
Mais, il y a un détail : « cette indemnité est versée pendant trois mois, à moins que l’intéressé n’ait repris auparavant une activité rémunérée ». L’activité rémunérée peut être un emploi dans le privé, un emploi public ou un mandat. Un mandat n’est pas un travail, mais cela reste une activité rémunérée.
Tous les ministres qui ont un mandat de député, retrouveront leur indemnité parlementaire et ne percevront donc pas d’indemnité de départ.
Un autre alinéa de l’article 5 comporte néanmoins un flou : « Cette indemnité ne peut être perçue par l’intéressé s’il a omis de déclarer à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, au titre de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, tout ou partie de son patrimoine ou de ses intérêts ».
Dans le cas qui nous intéresse, à savoir des ministres qui sont restés ministres 14 h, peut-on parler d’omission ? Il est évident que personne n’avait envisagé ce cas de figure. Par ailleurs, étant déjà députés, ils ont déjà effectué au moins une déclaration d’intérêt et une déclaration de patrimoine.
Que va-t-il se passer pour les lois en cours d’examen ?
Deux textes, déjà partiellement examinés, faisaient l’objet d’une attention particulière. Le premier est la transposition de la directive NIS2, qui concerne la sécurité informatique. Nous avons déjà un an de retard dans la transposition. Les députés ont examiné le texte en commission spéciale, mais, en l’absence de gouvernement, il ne peut pas être examiné en séance. On ne sait donc pas quand le texte verra le jour et cela expose la France à des sanctions pécuniaires.
Le second texte est celui sur la fin de vie. Ce dernier a été transmis au Sénat. Il aurait dû être examiné dans les jours à venir. En l’absence de gouvernement, le texte est gelé.
Que va-t-il se passer pour le budget ?
Dans la pire des hypothèses, le budget de l’année précédente peut être reconduit. Il existe une autre hypothèse dans laquelle, les parlementaires adoptent une loi de finances temporaire et transitoire et reviennent en début d’année avec une loi de finances rectificative.
Un cas de figure comme le shutdown américain n’est pas transposable en France. Les fonctionnaires seront donc payés. Néanmoins, aucune nouvelle prestation ne pourra être faite, ni nouvelle embauche.
Comment sortir de cette impasse ?
D’après nos informations, il est possible que le président de la République s’exprime ce soir. Même s’il a encore balayé l’hypothèse récemment, une dissolution reste sur la table. Cette dernière est appelée avec beaucoup de vigueur par l’extrême-droite et les différentes composantes de la gauche de l’Assemblée nationale.
Si cette hypothèse se confirme, les Français seront appelés aux urnes dans les prochaines semaines.
Le président de la République peut-il actionner l’article 16 de la Constitution ?
L’article 16 de la Constitution de 1958 est prévu pour des cas extrêmement graves : une guerre ou un coup d’État. Même si la crise politique que connaît la France n’est pas à minimiser, elle ne saurait être mise sur le même plan qu’une guerre ou un coup d’État.
