Onze groupes à l’Assemblée nationale : des conséquences très concrètes
Les députés se sont officiellement constitués en groupes. C’est un record : pour cette XVIIe législature, il y en a onze.
Pour exister politiquement et médiatiquement, les députés doivent rejoindre un groupe : ils peuvent être membres ou apparentés. Pour celles et ceux qui ne sont dans aucun groupe, ils vont siéger chez les non-inscrits.
Quelles sont les conséquences très concrètes de ce nombre important de groupes ? En premier lieu, on assistera à une inflation des commissions d’enquête. En effet, chaque groupe dispose de ce que l’on appelle un droit de tirage par session. Chaque groupe peut demander une commission d’enquête par an.
Il y a des règles de fond et de forme à respecter, mais l’Assemblée nationale est relativement souple sur ce sujet. On peut donc parfaitement se retrouver avec onze commissions d’enquête en même temps par an, d’autant que cet instrument de contrôle de l’action du Gouvernement ou d’évaluation des politiques publiques, est devenu au fil des années, un outil de communication politique.
Sur le plan logistique, cela va nécessiter des salles et surtout, des agents de l’Assemblée nationale pour assister les présidents et rapporteurs de commissions. L’autre difficulté va résider dans les agendas. Durant la XVIe législature, beaucoup d’internautes se sont émus de l’absence des députés lors des auditions de la commission d’enquête sur l’aide sociale à l’enfance. Or, au même moment, il y avait une séance publique, avec l’examen d’un texte, des réunions de commissions permanentes, des missions d’information, etc.
Contrairement à leurs homologues allemands, l’agenda des députés n’est absolument pas sanctuarisé. Tout se chevauche systématiquement et cette désorganisation parlementaire, en plus de nuire à l’image des élus, crée une frustration, aussi bien chez eux que chez les citoyens. Cela contribue à l’affaiblissement du Parlement.
Toujours en matière logistique, il va falloir trouver des bureaux pour les onze groupes parlementaires. Chaque député dispose d’un bureau, mais, chaque groupe a son propre bureau et là encore, les murs de l’Assemblée nationale ne sont pas extensibles. À tel point que certains groupes avaient atterri dans des préfabriqués à une époque.
Dès lors, il est assez probable qu’en raison de cette inflation de groupes, le budget de l’Assemblée nationale doive être revu à la hausse pour l’exercice 2025. Ce ne sera absolument pas une surprise. En effet, chaque première année de législature, des dépenses supplémentaires sont à l’ordre du jour, notamment pour les équipements des nouveaux. Il y a aussi eu les indemnités de licenciement des collaborateurs parlementaires.
Enfin, le temps de parole des députés durant les Questions au Gouvernement (QAG) va aussi être diminué par groupe, sauf si la conférence des présidents décide de rallonger leur durée. Sous la XVIe législature, elles duraient deux heures lorsqu’elles n’avaient lieu que le mardi, puis une heure trente le mardi et quarante-cinq minutes le mercredi. Si La France Insoumise ne va pas subir de baisse et gardera un temps équivalent — son nombre de députés étant quasiment le même — le Rassemblement National, ayant gagné des élus, peut prétendre à plus de temps, au détriment du groupe LR-Wauquiez, du groupe LR-Ciotti et de la majorité présidentielle. Il sera intéressant de voir ce que donnera la répartition du temps de parole lors de la toute première séance de QAG. Ce qui nécessite évidemment d’avoir un Gouvernement.
Le personnel de l’Assemblée nationale va être face à un véritable défi logistique pour organiser la maison, avec autant de groupes, sans créer de frustration. À charge pour le bureau de l’Assemblée nationale et surtout aux questeures de trouver des solutions efficaces.