Les députés ont décidé de s'attaquer à la fast-fashion.
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Sale temps pour la fast-fashion

Entre la proposition de loi Violland, les amendements désordonnés de Vermorel-Marques et la récente révision de la proposition cadre sur les déchets au Parlement européen, la fast-fashion va connaître des moments difficiles. On fait le point. 

La proposition de loi visant à réduire l’impact environnemental de l’industrie textile 

La député Anne-Cécile Violland a déposé une proposition de loi visant clairement ce que l’on appelle la fast-fashion. On désigne par ce terme les marques qui produisent des quantités très importantes de modèles et les changent sur un intervalle de temps extrêmement court. Figure de proue de ce phénomène, la marque Shein, qui s’est beaucoup fait connaître sur les réseaux sociaux, notamment Instagram. Proposant des vêtements à des prix très faibles, elle change en permanence ses collections. 

Si la fast-fashion ou mode éphémère a ses adeptes, spécialement chez celles et ceux dont le portefeuille est aussi mince que les mannequins de la Fashion Week, elle n’est pas sans conséquences environnementales, économiques et même sociales.   

Pour l’aspect environnemental, c’est donc la député Horizons Anne-Cécile Violland qui lance l’assaut avec sa proposition de loi, qui va être examinée en séance publique aujourd’hui. L’article premier concerne l’information des consommateurs, afin qu’ils sachent ce qu’ils achètent. L’article 2 renforce les obligations des producteurs, y compris s’ils ne sont pas en France. L’article 3 vise à interdire la publicité pour ces entreprises. 

Est-ce que le texte sera voté aujourd’hui ? Rien n’est moins sûr : le député Antoine Vermorel-Marques a décidé de jouer les trouble-fêtes.

Parasitisme parlementaire

Alors qu’Anne-Cécile Violland avait enregistré sa proposition de loi le 30 janvier 2024, Antoine Vermorel-Marques a décidé de faire sa propre proposition de loi, sur le même sujet, et de la déposer le 5 mars 2024

Lui vise plutôt un système de bonus malus pour les enseignes de fast-fashion, avec des pénalités financières de 5 € par produit. L’approche est donc différente, mais plutôt que de négocier avec Anne-Cécile Violland, il a déposé un certain nombre d’amendements pour la séance publique sur son texte. 

Au total, il signe ou cosigne 28 amendements sur les 203 enregistrés, mais ils sont cosignés par l’ensemble des députés Les Républicains. Aucun risque qu’ils ne soient pas soutenus. Mais, à la lecture des échanges en commission, même si le texte n’est pas examiné en totalité aujourd’hui, il sera repêché ou remis à l’ordre du jour. 

C’est assez rare pour le souligner, surtout en période de majorité relative : tous les groupes parlementaires ont accueilli avec enthousiasme la proposition de loi Violland. Chacun a avancé des raisons différentes, mais tous les députés de la commission du développement durable ont indiqué qu’ils étaient favorables à cette avancée. 

Des alertes timides au Sénat 

Au Sénat, on ne trouve pas de textes sur la fast-fashion, mais plusieurs sénateurs ont posé des questions ces dernières années, pour interpeller les ministres sur les problèmes qu’elle pose. 

Si la proposition de loi Violland arrive jusqu’au Sénat, il est probable que le groupe de l’Union Centriste décide de s’en emparer. 

Le sénateur Franck Dhersin s’est intéressé à ce sujet, notamment sous l’angle économique. La fast-fashion a un impact négatif sur les enseignes de prêt-à-porter françaises. 

Les parlementaires et essentiellement les députés français peuvent se vanter d’être à l’avant-garde sur ce sujet par rapport au Gouvernement. Il a d’ailleurs engagé la procédure accélérée sur ce texte. Si ce dernier décide de traîner les pieds pour sortir les décrets d’application, les parlementaires auront un allié de poids : le Parlement européen. 

Travail forcé et déchets textiles

En session plénière ce mercredi 13 mars 2024, les députés ont révisé la directive cadre sur les déchets. Objectif : réduire les déchets, en imposant de nouveaux critères plus contraignants. En dehors du relèvement des seuils, les producteurs devront assumer les coûts de collecte, de tri et de recyclage des déchets textiles. 

On estime qu’il y a 12,6 millions de tonnes de déchets textiles produits dans l’Union européenne et moins de 1 % des textiles dans le monde font l’objet d’un recyclage. Les instances européennes en sont à leur début de processus législatif, le travail se poursuivra sous la Xᵉ législature, après les élections européennes. Les députés européens, présents au moment du vote, ont tous voté pour cette révision de la directive

En dehors de ces textes sur les aspects environnementaux, le Parlement européen a adopté, lors de la dernière session plénière, une interdiction de principe des produits issus du travail forcé. Or, une partie importante des productions textiles provient de l’esclavage. 

Les entreprises textiles vont devoir adopter des pratiques environnementales, sociales et économiques plus vertueuses dans les mois à venir, si elles veulent pouvoir continuer à travailler dans l’Union européenne.