SHEIN et Temu sont dans le viseur des autorités européennes. Une enquête devrait être lancée cette semaine, en même temps que des mesures législatives.
L'Europe

Les Français vont devoir apprendre à se passer de SHEIN et Temu

Avec l’actualité parlementaire française, on en avait presque oublié les instances européennes, dont la Commission européenne. Cette dernière planche sur une série de mesures visant à mettre SHEIN et Temu au pas.

SHEIN est une plateforme d’e-commerce, vendant des vêtements à des prix extrêmement bas. Les Français en sont fans, même ceux qui n’ont pas de problèmes de pouvoir d’achat. Pourtant, ces vêtements sont de très mauvaise qualité et sont issus de l’esclavage.

Temu est une sorte de concurrent d’Amazon, qui a inondé le marché européen en quelques mois, grâce à des campagnes ultra-agressives sur les réseaux sociaux et une stratégie low cost, faisant appel à des influenceurs et des micro-influenceurs. Les influenceurs passaient — et passent toujours — par un système d’affiliation : ils font la promotion des produits Temu sur leurs différents comptes de réseaux sociaux et reçoivent un pourcentage lorsque la vente est effectuée.

Là encore, la qualité n’est pas au rendez-vous et ce sont des produits issus de l’esclavage. En effet, une enquête américaine, menée par le Gouvernement, a révélé qu’il y avait un « risque extrêmement élevé » que les produits vendus sur Temu puissent avoir été fabriqués par du travail forcé.

La député conservatrice Alicia Kearns, alors présidente de la commission des affaires étrangères de la Chambre des Communes (Royaume-Uni) a déclaré à la BBC fin 2023 « Quand vous regardez d’où Temu obtient ses marchandises, où en Chine elle les produit, vous pouvez voir que ce sont des zones où nous savons qu’il y a un recours à la force et au travail forcé des esclaves ouïghours ».

La Commission européenne a décidé de mettre un frein à ses deux mastodontes. Plusieurs raisons sont évoquées. En premier, l’absence de sécurité et de conformité avec les normes européennes. Ces produits ne respectent tout simplement pas les normes de sécurité et peuvent même être dangereux pour les consommateurs. Raison ? Ce sont des contrefaçons et c’est l’une des raisons avancées par la Commission européenne qui met en avant la concurrence déloyale et la perte de compétitivité que subissent les entreprises européennes.

Autre problème : la durabilité des produits. SHEIN est l’archétype de la mode jetable et encourage très fortement cette tendance, en proposant, non pas des collections toutes les saisons, mais, tous les jours. Même problème pour Temu : les produits sont de mauvaise qualité. Ainsi, les consommateurs les jettent et cela crée des déchets, que plus personne n’est capable de gérer, ni même de recycler, en fonction des composants.

Dès lors, la Commission propose d’adopter une réforme douanière, afin que moderniser le système et surtout de partager la charge. Seuls six pays sont responsables de 89 % de la surveillance des marchandises arrivant sur le sol européen, dont la France.

Autre axe de travail : la protection de l’environnement et la Commission invite les colégislateurs à une révision de l’accord-cadre sur les déchets, avec une responsabilité élargie des producteurs de textiles et de chaussures.

Un testing et des achats mystères vont également être menés pour tester les produits vendus sur ces deux plateformes et vérifier qu’ils répondent bien aux normes européennes. Mercredi, une enquête sera officiellement ouverte contre SHEIN. L’entreprise a promis de collaborer avec toutes les parties prenantes pour répondre aux inquiétudes.

Pour le moment, la seule véritable sanction à craindre serait une amende. Mais, entre les différents problèmes fiscaux, légaux, règlementaires et le fait que ces produits soient issus de l’esclavage, rien ne garantit que les deux géants chinois puissent couler des jours heureux sur le sol européen.

En France, la député Anne-Cécile Violland avait déposé une proposition de loi sur la fast-fashion et on retrouve des initiatives de tout bord, avec des intérêts différents, visant à supprimer cette tendance. Les différentes critiques émises envers la plateforme ont suscité la colère du nouveau lobbyiste de SHEIN : Christophe Castaner, l’ancien ministre de l’Intérieur, qui officie dans le comité responsabilité sociale et environnementale. L’entreprise s’est aussi offert les services de Nicole Guedj, ancienne secrétaire d’État aux droits des victimes.

Quand bien même, Temu et SHEIN se décideraient à respecter quelques normes européennes, la nouvelle législation européenne sur le travail forcé devraient mettre un coup d’arrêt à leurs activités sur le sol européen.